Comment prendre conscience de sa valeur ?

Lorsque l’on a une faible estime de soi, le premier pas est de prendre conscience de sa valeur. Or, c’est l’inverse qui s’est produit dans notre passé. Il faut donc apprendre à se voir différemment.
Saverio Tomasella, psychothérapeute et psychanalyste, nous explique comment changer notre regard pour enfin prendre conscience de notre valeur et acquérir les bases d’une saine estime de soi.

C’est une question très importante en thérapie ou dans tous les cheminements de développement personnel. Parce que si mes parents m’ont dévalorisé répétitivement et surtout publiquement devant mes frères et sœurs, devant d’autres membres de la famille, parfois devant des amis, j’ai intégré les paroles qu’ils ont proférées comme étant des prophéties sur moi, des malédictions. Et donc j’intègre des croyances sur moi. Surtout que plus on est petit, moins on arrive à contredire ses parents. Si ma mère ou mon père ou les deux disent ça, c’est que c’est vrai. Donc je l’intègre comme étant mon identité. Je ne suis pas belle ou pas beau, je ne suis pas intelligente ou intelligent. Je ne suis pas capable ou je veux toujours avoir peur, ou je ne suis pas forte ou pas fort. S’ils ne le disent qu’une seule fois, un jour de colère et qu’après ils nous demande pardon. « Je suis désolé, tu sais, hier  j’étais en colère, j’ai dit des choses que je ne pensais pas. » Ça fait mal sur le coup, mais ça, ça ne s’imprime pas dans l’identité, dans l’idée, dans la conception qu’on se fait de soi-même. Mais s’il le répète suffisamment souvent, et surtout que c’est dit en public, alors on pense, on intègre ce miroir de soi et on pense qu’on est comme ça.

Donc on va créer un ensemble de croyances sur nous qui font identité. Et après? Au collège et au lycée, pendant nos études, pendant le travail, les relations amicales, la relation amoureuse, amoureuse, tous les autres vont nous dire ce que tu fais c’est  super, tu es une belle personne etc on l’entendra, ça nous fera plaisir. Mais dans ce soubassement, tout ce système de croyances qui ont sapé notre confiance en nous, il reste et il reste plus puissant. Ce qui fait qu’on aura toujours besoin que les autres nous redisent, ce n’est pas qu’on ne les croit pas, c’est qu’il y a une espèce de travail de sape, d’auto sabotage de ce système de croyance en plus profond, en souterrain, qui vient dénigrer ou discréditer tout ce que les autres peuvent nous dire.

Donc, c’est pour ça que parfois le coaching n’est pas suffisant. Parce que le coaching, il peut agir au niveau de ce que l’adulte est capable de faire s’habiller mieux, parler mieux, dire plus précisément ce qu’on veut, participer plus facilement aux réunions, tout ça c’est très bien. Et puis après demander aux autres ce qu’ils pensent etc. Donc on va le faire et on va effectivement avoir des retours positifs, mais ça ne va pas changer le courant souterrain qui lui est plus puissant et donc c’est là qu’on a besoin d’une thérapie.

Et dans la thérapie, on a besoin de déconstruire ses croyances. Donc si on passe par la psychanalyse, on va déconstruire la puissance, non seulement des mots que l’on a cru être vrais, mais comment notre position d’enfant par rapport à nos parents faisait qu’on a accepté leurs malédictions, leurs mauvais comportements, leurs mauvais mots sur nous comme étant des vérités. Parce que si je ne fais que dire que ce n’est pas vrai que vous étiez un enfant formidable, etc, ça aide un peu, mais ça ne va pas complètement déconstruire.

Il faut que le patient ou la patiente comprenne de l’intérieur dans quelle position il/elle était enfant pour gober ça comme quelque chose de vrai. Eh bien non, ils se sont trompés !

Parfois la psychanalyse ne suffit pas. On a besoin de passer, par exemple par des exercices d’hypnose. En hypnose, on s’est rendu compte que ce que nos parents nous disent est venu aussi par les oreilles et surtout par les oreilles. D’ailleurs, ça n’était pas écrit, c’était entendu. Donc, dans les séances d’hypnose ou en auto hypnose, on va dire quelque chose qui va contrecarrer ces fausses paroles des parents à haute voix et soi-même. On va se le répéter plusieurs fois par jour. Notre cerveau a besoin que ça passe par nos oreilles et par le circuit neuronal des oreilles pour imprimer une autre vérité, pour imprimer une autre information. Donc on peut dire je suis belle, je suis beau, je suis gentil, je suis gentille, je suis intelligente, je suis intelligent. On prend le contre-pied de ce que nos parents nous ont dit et on peut aussi prendre le contre-pied avec un exemple : « La preuve : aujourd’hui, en réunion, ma collègue a mis en évidence la qualité de mes idées. » Et on se répète ça plusieurs fois à haute voix pour que ça puisse reprendre le même chemin.

Quand il y a un parent absent ou les deux parents absents, parce qu’ils peuvent l’être physiquement mais aussi psychiquement et n’être que dans le fonctionnel, pas présent du tout dans la relation avec leurs enfants : là, c’est plutôt la relation avec le thérapeute qui est en elle-même thérapeutique, soignant. C’est pour ça que c’est si important de choisir une thérapeute ou un thérapeute vraiment humain, vraiment bienveillant, vraiment empathique, qui soit vraiment là et pas dans un discours et pas dans une théorie, pas dans du dogme.

Il n’a pas besoin d’être connu ou elle n’a pas besoin d’être connue parce qu’en fait ce qui est vraiment nécessaire, c’est d’être face à quelqu’un qui nous accueille, qui nous écoute, qui nous comprend séance après séance. Et ce lien-là va venir remplacer l’absence de lien qu’on avait avec des parents absents. Ce lien-là, qui est vraiment humain, présent, il est guérissant.

C’est valable dans une thérapie si ça dure suffisamment longtemps, mais c’est aussi valable dans les très grandes amitiés, dans les très grandes relations amoureuses. C’est à dire que là, on a la chance de vivre enfin des relations où il y a quelqu’un en face, quelqu’un qui nous aime comme on est, quelqu’un qui nous écoute vraiment. Même si elle ou n’est pas d’accord, elle va dire « non là je ne pense pas tout à fait comme toi » ou « moi, j’ai une autre expérience », mais la personne est là et donc tout d’un coup on se dit « ouah, j’existe avec elle ou avec lui ». Et au bout d’un moment, ça s’inscrit. Ça prend du temps, mais au bout d’un moment, ça s’inscrit en nous. On va intérioriser cette relation et c’est ça qui devient le socle de notre confiance.

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