Qu’est-ce qu’un pervers narcissique et comment peut-on le repérer ?

Le terme « pervers narcissique » est aujourd’hui souvent employé sans réellement savoir ce que cela signifie. Car la perversité narcissique est une véritable pathologie psychiatrique touchant environ 2% de la population. Mais faisant beaucoup de dégâts…
Clotilde Ziegler, psychothérapeute spécialiste du sujet, nous décrit le profil du pervers ou de la perverse narcissique.

Un pervers narcissique est une personne porteuse d’une pathologie grave. Il s’agit d’une psychose blanche : psychose cela veut dire que c’est une folie et blanche qu’elle est sans gros symptômes du type hallucinations/délire. Le pervers narcissique est donc pervers et narcissique. Une personne narcissique c’est une personne qui est accro à l’image d’elle-même, elle met toute son énergie dans le fait de rendre une image au monde et met plus d’énergie dans l’image que dans la chose fait elle-même. Il a deux problèmes majeurs ce Narcisse ; le premier est que comme il est uniquement dans la façade, évidemment le fait qu’on reconnaisse la façade ne va pas nourrir son besoin de reconnaissance donc c’est sans fin, comme un assoiffé qui ne parvient pas à apaiser sa soif. D’autre part pour obtenir de la reconnaissance de quelqu’un il faut que le quelqu’un en face soit considéré comme quelqu’un de valable, or Narcisse ne fait pas ça car dès qu’en face quelqu’un est valable cela le met en danger, en tout cas sur le moyen et long terme. Donc comme il cherche absolument à paraitre prestigieux (le prestige dépend évidemment des milieux qu’il fréquente) il va chercher à avoir en permanence les projecteurs sur lui, à être en permanence au centre de l’attention. Il va exagérer ses faits et gestes : un petit jogging du dimanche va devenir un entrainement pour le marathon etc. Il va être extrêmement susceptible, incapable de prendre la moindre remarque sur lui sans contre-attaquer, se défendre, se sentir blessé parfois de façon très importante. Il est tellement centré sur lui qu’il manque singulièrement d’empathie c’est-à-dire que l’autre n’est au fond pour lui qu’un miroir qui lui rend son image comme dans Blanche-Neige : « miroir oh mon beau miroir dis-moi que je suis la plus belle », mais il est incapable de comprendre ce qui anime l’autre : la seule chose qui l’intéresse c’est lui. Ça c’est Narcisse.

Le pervers narcissique est sadique

Le pervers narcissique c’est donc un Narcisse pervers. Le narcissique tout court est pénible. On voit bien un sujet égocentré, égoïste, entièrement dévoué à son propre éclat, mais le pervers lui il est toxique. Pour dire les choses très simplement : il est sadique, c’est-à-dire qu’il a de la jouissance à faire souffrir l’autre. Et comme le pervers narcissique est narcissique, cette jouissance c’est le fait de se sentir grand de faire souffrir l’autre. Son pouvoir et sa puissance se mesurent à son pouvoir de nuisance. Donc le pervers instrumentalise l’autre, il le déshumanise, il le considère comme un instrument de son bon plaisir et donc si son bon plaisir consiste à faire souffrir l’autre, tout va beaucoup moins bien pour l’autre …Il y a des degrés dans la perversité : de la perversité courante dont on peut tous faire preuve à la grande perversité dont font partie la barbarie et les choses les plus atroces. Le pervers narcissique il conjugue les deux.

Il donne l’image de la personne que l’on cherche

Ce qui le rend dangereux au-delà de son pouvoir de nuisance en lui-même c’est qu’il avance masqué. Le premier des masques et un masque de séduction et donc il s’ingénie à donner à celui ou celle qui va venir sa proie très exactement l’image de ce que celui ou celle veut rencontrer. En général quand c’est trop beau pour être vrai, c’est souvent que c’est trop beau pour être vrai. Donc si je cherche un intellectuel prestigieux je vais avoir en face de moi un intellectuel prestigieux qui va s’intéresser à mon propos, si je cherche un copain qui adore le foot je vais avoir un aficionado incroyable. Si je suis une femme divorcée avec des enfants et que je cherche à faire une famille recomposée façon la petite maison dans la prairie, il n’y a pas de problèmes c’est ça que je vais rencontrer. Donc il commence par ce masque de séduction et puis derrière ce masque qui lui est beaucoup plus pernicieux : en fait qui est le masque de la normalité. C’est-à-dire que le pervers est très atteint psychiquement mais une nuance à côté de la nuance normale et c’est ça qui est très difficile à gérer. C’est pour cela que les proies restent longtemps car elles cherchent à comprendre ce que fait ou ce que ce que ne fait pas l’autre à partir des catégories qu’on utilise pour comprendre les gens normaux. Donc « s’il a fait ça c’est qu’il est stressé, s’il a fait ça c’est qu’il a eu une enfance malheureuse » : en plus le pervers narcissique s’ingénie à passer pour une victime donc c’est facile… S’il a fait ça c’est que moi la proie j’ai quelque chose qui effectivement ne va pas. Et comme les proies sont des personnes de bonne volonté elles se remettent en question. En fait c’est ce masque de la normalité qui dans mon expérience de clinicienne est le plus difficile à enlever. Ce moment qui dure parfois des mois où les proies en face de moi me disent : mais c’est pas possible … et hop c’est comme un gouffre qui s’ouvre sous leurs pieds et puis c’est tellement inconcevable au sens propre, ça ne peut pas concevoir, que ça se referme immédiatement.

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